SÉLECTION DE LA CORRESPONDANCE ÉTUDIÉE ET MÉTHODOLOGIE UTILISÉE.
Voir Fonds de Saxe
L’objectif de notre étude consistait à identifier le réseau d’un prince allemand à travers sa correspondance conservée dans le Fonds de Saxe. Si nous excluions le courrier relatif à la guerre de Sept ans qui fit l’objet d’un classement spécifique, cette correspondance comprenait quelque cinquante mille pièces de sept cent quarante correspondants, dont quatre mille minutes de lettres envoyées189Voir Fonds de Saxe, liasses E*1421 à E*1458. Évidemment, il n’était pas réaliste de vouloir toutes les étudier, ni même espérer pouvoir toutes les lire. Il nous fallait donc restreindre le champ de nos recherches
La correspondance du prince et la sélection des lettres étudiées.
Nous décidâmes dans un premier temps de nous limiter à la correspondance que le prince Xavier de Saxe reçut de ses frères et sœurs190 considérant qu’ils formaient le premier cercle d’un éventuel réseau ; cela représentait un peu plus de quatre mille quatre cents lettres191. Pourquoi se limiter au courrier reçu et ne pas étudier la correspondance envoyée par le prince lui-même ? Ce choix fut dicté par des raisons de facilité d’accès aux documents. En effet, le prince ne conserva pas une copie de toutes les lettres qu’il envoya. Certaines minutes se limitaient à n’être que des états du courrier envoyé, états mensuels sur lesquels étaient mentionnés le destinataire, la date de départ, l’objet de la lettre et enfin une indication précisant si la lettre avait été écrite de la main du prince ou simplement signée par lui. À ces états s’ajoutaient des copies de lettres, parfois de simples brouillons à la lecture extrêmement difficile. Sauf rares exceptions, les minutes de la correspondance générale du prince furent classées par ordre chronologique sans archivage spécifique en fonction des destinataires. Aussi, si nous avions voulu n’étudier que les lettres adressées à ses frères et soeurs, il nous eut fallu les rechercher dans les trente-neuf liasses192 contenant quatre mille neuf cent cinquante pièces et nous n’aurions souvent trouvé qu’une simple mention sur un état.
Quatre mille quatre cents lettres reçues de ses frères et sœurs représentaient un volume de courrier trop important à étudier. Aussi, nous décidâmes de faire une coupure dans le temps, ne conservant que les lettres émises pendant la période 1771-1791, deux dates qui correspondaient respectivement à l’acquisition d’une première résidence en France par le prince Xavier, et à son départ en exil. Après ce double choix, il restait un peu plus de trois mille six cents lettres à consulter et il nous fallait procéder à une troisième sélection.
Nous choisîmes d’utiliser les travaux de J.-J. Vernier et de ses collaborateurs. En effet, nous avons indiqué au chapitre II, que ceux-ci avaient dans leur Inventaire … du Fonds de Saxe, répertorié, daté, identifié et analysé ‘‘certains’’ documents ; l’analyse pouvant parfois être très complète avec de larges citations193. Nous admîmes que les lettres qui avaient été spécifiquement inventoriées, devaient présenter un intérêt particulier qui les avait fait distinguer des autres documents. Il nous sembla donc logique d’utiliser la sélection déjà opérée et de n’étudier que les lettres faisant l’objet d’une citation dans l’Inventaire de J.-J. Vernier. Après cette nouvelle sélection, nous n’avions plus (!) que trois cent seize lettres à étudier et nous pouvions considérer que notre domaine de travail était défini.
Quelques lettres ajoutées à notre sélection.
En 1771, lorsque le prince Xavier de Saxe décida de s’installer en France, la fratrie du prince Xavier de Saxe, avait perdu trois de ses membres : Marie Amélie, reine d’Espagne, décédée en 1760, le prince électeur de Saxe, Frédéric-Christian-Auguste, décédé en 1763, et la dauphine de France, Marie-Josèphe, décédée en 1767. En conséquence aucune de leurs lettres n’était incluse dans la période de temps considérée et donc dans la sélection de lettres étudiées. Nous pensâmes qu’il était regrettable de les ignorer complètement. Le principal du traitement statistique étant déjà terminé, nous décidâmes de les soumettre à une étude spécifique et d’en faire l’objet d’un commentaire particulier194.
Ce travail différent dans sa méthodologie, ouvrit un nouveau pôle d’intérêt et conduisit à rechercher et à lire les réponses du prince Xavier de Saxe aux lettres de ces trois personnages. Il fut découvert qu’elles faisaient l’objet d’un archivage particulier dans le Fonds de Saxe, archivage qui sembla195 être d’origine, c'est-à-dire, mis en place par le prince Xavier ou par son secrétariat196Voir Fonds de Saxe, liasses E*1451 et E*1452. Cela augmenta notre curiosité. Poursuivant nos recherches, nous découvrîmes que la princesse Christine de Saxe, abbesse de Remiremont197Voir Fonds de Saxe, liasse E*1455 bénéficia elle aussi, d’un archivage spécifique pour le courrier qui lui était adressé : en conséquence, ses lettres firent aussi l’objet d’une approche particulière de notre part.
Nous avons enfin estimé devoir étudier deux autres correspondances. D’une part, acceptant de payer notre écot au culte dont bénéficient les objets ayant appartenu à la famille royale victime de la terreur de 1793, nous avons identifié et étudié une lettre de Louis-Auguste, duc de Berry et futur Louis XVI, datée de 1770198Voir Fonds de Saxe, liasse E*1536. Puis, pour apporter un clin d’œil à cette étude et dans un registre beaucoup plus léger, nous avons souhaité ajouter à notre sélection, quelques-unes des cent soixante et onze lettres reçues et conservées de ses maîtresses199Voir Fonds de Saxe, liasses E*1552 à E*1558.
Ultime remarque, en travaillant sur les lettres envoyées à son frère aîné le prince Frédéric-Christian-Auguste, futur électeur de Saxe, et à sa belle-sœur, Marie-Antoinette de Bavière, son épouse, nous découvrîmes que le prince Xavier de Saxe lui écrivit neuf lettres entre le 5 et le 27 juillet 1763. Dans ces lettres il n’était fait référence à aucun événement particulier qui aurait justifié cette correspondance, et leur contenu a semblé d’une grande tendresse toute en conservant une forme et un vocabulaire extrêmement décents, compatibles avec une relation fraternelle étroite. Une nouvelle fois notre curiosité fut éveillée. Des recherches furent conduites, nous avançâmes des hypothèses. Le résultat de notre travail sur cette correspondance remarquable par sa fréquence200, fit lui aussi l’objet d’un commentaire particulier.
Au total, nous avions donc sélectionné et étudié cinq cent trente-six lettres201, dont trois cent seize se virent appliquées un traitement statistique sur les thèmes traités et sur les personnages cités. La distribution de ces lettres entre leurs différents expéditeurs ou destinataires, a été indiquée dans le tableau ci-dessous intitulé : « Distribution des lettres reçues (ou expédiées) de ses frères et sœurs par le prince Xavier, et étudiées dans les chapitres à venir »202.
La méthodologie utilisée a été exposée dans la deuxième partie du présent chapitre. La description de la correspondance de chaque membre de la fratrie un peu élargie, et l’étude statistique du contenu des lettres, ont fait l’objet des deux prochains chapitres.
Tableau : Distribution des lettres étudiées.
Dans la version finale et imprimée de ce mémoire, la présente page est remplacée par le document Excel référencé :
Distribution des lettres (reçues ou expédiées) de ses frères et soeurs par le prince Xavier, et étudiées dans les chapitres à venir.
Méthodologie retenue.
Pour mener l’étude statistique du contenu des lettres, nous avons utilisé le programme Excel® développé par la firme Microsoft®. Il s’agit d’un progiciel de tableur électronique (spreadsheet) généralement utilisé pour organiser, calculer et analyser des données numériques, mais qui, dans certaines conditions, permet de traiter des données alphabétiques. Ainsi, il est possible de déterminer dans une liste de « mots clefs », le nombre de fois et la fréquence où un mot-clef spécifique apparaît. À titre d’exemple, à partir d’un inventaire de lettres du prince Xavier de Saxe, nous pouvions, sous certaines conditions, déterminer combien de fois le mot « roi de Pologne » était utilisé dans les lettres échangées avec le prince Albert son frère. De même, il nous était théoriquement possible de connaître la fréquence d’apparition du thème « succession » associé à ce mot « roi de Pologne » dans ces mêmes lettres.
Il était évident que ce programme Excel n’était qu’un outil de traitement, et ne pouvait donc, « traiter » que ce que nous lui fournissions. Cet aspect était le point faible de notre méthode. Ainsi, si un thème important (qui dans une hypothèse pessimiste, pourrait s’avérer le thème majeur ou le plus fréquent de la correspondance du Fonds) n’a pas été pré-identifié par un mot-clef au moment de l’établissement de la liste des lettres étudiées (la « base de données »), celui-ci n’apparaîtra pas dans le résultat final.
L’étude consista donc dans un premier temps, à créer « la base de données » de notre étude, c’est-à-dire une liste des lettres reçues que nous souhaitions traiter. Cette liste comprenait et faisait apparaître les éléments que nous voulions ou pensions utiliser dans le traitement. Pour cela, nous choisîmes deux « ensembles203 » d’éléments susceptibles de traitement.
Un premier ensemble fut construit. Il consista en un inventaire de mots-clefs que nous sélectionnâmes dans le processus de lecture des lettres. Le choix de ces mots-clefs fut purement subjectif et intuitif, mais devint plus raisonné avec l’avancement de l’étude. Ainsi, il est évident que dans la lettre de condoléances adressée par la sœur du prince Xavier, l’épouse de l’électeur de Bavière, lorsqu’elle lui écrit à la mort de Louis XV (lettre que nous reproduisons ci-dessous204Voir Fonds de Saxe, liasse E*1500), nous avons retenu les mots « Etablissement » et « Réseau » et les avons associés au mot « Décès » de préférence au mot « Mondanités205 » qui aurait pu être choisi en début d’analyse.
« Nous avons appris la triste nouvelle de la mort du Roi. Ma première pensée était pour vous. Je veux cependant me flatter que ce triste événement ne portera point de changement à vos affaires ».
Le second ensemble inventoria les noms des personnages cités dans les lettres étudiées. Nous espérions que l’identification de ces personnages nous permettrait de compléter l’organisation des réseaux du prince Xavier de Saxe, voire d’en découvrir de nouveau. Cela ne fut pas possible. Les explications relatives à cet échec firent l’objet d’un paragraphe spécifique dans le chapitre IX.
Cette ‘’base de données’’ se présenta sous la forme d’un document de « format paysage » de deux feuillets en largeur et de plusieurs centaines de lignes en hauteur. La pagination fut établie de gauche à droite et de haut en bas (pagination dite en « Z »). Les résultats du traitement des données de cette liste firent l’objet de la seconde partie du développement de cette étude.
La méthodologie de sélection et de traitement des correspondances à étudier, étant exposée, et avant de présenter et analyser la base de données construite à partir de l’étude statistique du courrier sélectionné, il nous a paru nécessaire de décrire et étudier qualitativement et pour chaque correspondant, le courrier qui le concernait. Cette étude et les résultats correspondants firent l’objet du chapitre qui suit.